Troisième invitée de notre podcast les Médias se mettent au Vert, la journaliste Paloma Moritz, responsable du pôle écologie de Blast. Son premier credo : il faut comprendre pour agir, et c’est pour cette raison qu’elle invite, longuement, des chercheurs à revenir sur les enjeux de la transition. Son second credo : l’action est le meilleur moyen de lutter contre l’éco-anxiété.
Ses interventions face caméra, pour le média indépendant Blast, se caractérisent par un ton et un style qui n’ont rien à voir avec les figures imposées sur les écrans grands publics.
Face à l’urgence de la situation et devant l’inertie de nos sociétés, Paloma Moritz plaide volontiers pour l’engagement et n’hésite pas à le faire savoir sur des plateaux de télévision. Un·e journaliste à la hauteur de l’urgence écologique doit certes faire œuvre de pédagogie, mais il (ou elle) peut (et doit ?) aussi inviter son audience à se mobiliser pour accélérer sans tarder la transition vers un monde décarboné. Quitte à sortir de l’actualité pour questionner nos idées reçues sur la croissance, la désobéissance civile ou encore le rôle historique des énergies fossiles dans la trajectoire de nos sociétés.
Au micro de Julien Le Bot, Paloma Moritz revient sur sa vision d’un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique. Elle articule son combat pour plus de climat dans les médias avec une réflexion de fond sur la question démocratique. Et revient sur son parcours qui nous emmène en Californie, en Chine… ou dans la salle de la presse de la Convention citoyenne pour le climat.
Au-delà, elle revient sur la transformation du débat public : si le climato-scepticisme a nettement reculé, il est fondamental à présent de se méfier de la tension du climato-relativisme qui risquerait de démobiliser nos sociétés.
Enfin, Paloma Moritz revient sur ses sources d’inspiration, et sur les défis qui attendent les médias pour informer des audiences parfois éprouvées par l’éco-anxiété, et tentées par l’évitement de l’info.
Assistez aux prochains enregistrements et soyez informés de la publication des nouveaux épisodes
Si vous voulez avoir la possibilité d’assister vous aussi aux enregistrements des épisodes avec nos prochains invités, abonnez-vous à notre liste de diffusion.
Cet épisode a été enregistré en public, le 1er décembre 2022, chez Creatis (Paris 11) et réalisé par Sylvain Pinot.
Citations de Paloma Moritz
“Je pense sincèrement qu’il faut aujourd’hui faire le pari sur l’intelligence des citoyennes et des citoyens.”
“Mon but n’est pas d’être dans la contradiction à tout prix : on a un peu ce problème, dans le système médiatique actuel, de penser que faire son travail de journaliste, c’est contredire en permanence ce que dit l’invité même si ce qu’il dit est de bon sens.”
“L’urgence écologique, c’est un problème extrêmement complexe et donc on ne peut pas en parler en cinq minutes sur un plateau télé.”
“Cela fait un bon moment qu’on sait et qu’on voir le réchauffement climatique, mais on alterne entre déni et conscience de l’urgence”
“On ne peut pas régler le problème du climat, de la biodiversité sans réduire les inégalités sociales, ce qui implique d’essayer de montrer le côté systémique et donc d’en passer par l’Histoire pour essayer de comprendre.”
“Les commentaires YouTube, on les voit en direct, on ne sait jamais sur quoi on va tomber, et ça peut être violent.”
“Je reçois beaucoup de messages sur les réseaux sociaux, que ce soit sur Instagram, sur Twitter et aussi sur la boite mail de Blast, et j’essaie au maximum de les prendre en compte. Je reçois parfois même de très longs mails de retours de décryptage sur mes vidéos, des gens qui me disent : “mais ce serait super que tu parles de ça !”
“Au tout début de Blast, on s’est dit qu’on allait faire des vidéos face caméra, mais pour la simple et bonne raison que ça coûtait beaucoup moins cher que de faire un reportage”.
“Il y a sur Twitter des moments de harcèlement où, pendant deux ou trois jours, il y a des tonnes de notifications. Et là je vois que le ton n’est pas forcément très sympathique. J’essaie alors de ne pas les lire et de ne pas aller sur Twitter pendant quelques jours.”
“J’ai eu plein de déclics différents d’une certaine manière, mais je pense que le film qui m’a marqué, c’était “Une vérité qui dérange” d’Al Gore, c’était en 2006, et ça raconte aussi cette manipulation de la parole scientifique et la fabrique du doute par les lobbyistes fossiles”
“Après l’échec de la COP de 2009 à Copenhague, j’ai commencé à vraiment être très intéressée par l’écologie.”
“On prend souvent cette métaphore de la pilule rouge et de la pilule bleue de Matrix par rapport aux questions écologiques. Moi j’ai vraiment eu l’impression de de prendre progressivement la pilule verte”
“En vivant en Chine, en fait, j’ai vraiment eu l’impression de vivre dans le futur”
“La première grande question qui m’intéresse, c’est la question démocratique. Parce que, pour moi, la question des règles du jeu est la plus importante.”
“La question démocratique est essentielle face à l’urgence écologique.”
“Il y a une nécessité aussi d’avoir des démocraties très fortes parce qu’on sait que les chocs à venir vont être de plus en plus importants.”
“A la base, l’écologie ou la démocratie ne sont pas forcément des sujets qui déchaînent les foules.”
“Ce qui m’excite dans mon métier de journaliste, c’est vraiment d’essayer de rendre sexy ce qui ne l’est pas a priori.”
“L’éco-anxiété, c’est lié à cette angoisse qu’on a face à l’urgence écologique (…) et c’est réellement lié à l’idée que ça va être de pire en pire”
“Quand j’ai lu que si on dépassait les deux degrés, à peu près 100 % des coraux allaient disparaître, c’est quelque chose qui m’a profondément choquée.”
« Être entourée de journalistes, de militants, de militantes qui font tout pour faire bouger les choses, ça me donne énormément d’espoir”
“Pour moi, l’action est le meilleur remède à l’anxiété.”
“Le rapport à l’information ne doit pas être passif”
“On est dans une société donnée, dans un système donné, et on ne peut pas demander aux gens d’être absolument parfait quand tout est organisé autour d’eux pour qu’ils ne fassent que consommer quoi.”
“Il ne faut pas non plus que les vues soient le seul indicateur en terme d’impact”
“Il y a quelque chose d’émancipateur pour moi dans le fait de comprendre les rouages qui nous ont menés dans la situation dans laquelle on est aujourd’hui”
“Ce qui me fait sortir de mes gonds, c’est quand dans des émissions, je suis présentée comme militante avant d’être présentée comme journaliste”
“L’écologie n’est pas une cause, la science n’est pas une opinion et je pense que c’est hyper important de le marteler”
“Aujourd’hui, le climato-relativisme a en quelque sorte remplacé le climato-scepticisme”
“La culture peut être un relais de l’information plus classique.”