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Les prosfessionels développement média #mediadev du monde entier se retrouvent chaque année en Allemagne à l’initiative de la Deutsche Welle. Une édition 2024 assez morose pour le Global Media Forum. Partout dans les monde, les médias et les journalistes souffrent. Les raisons d’espérer sont rares même si l’événement était placé sous le signe du « partage de solutions ».

L’histoire et la géographie ont de l’ironie. C’est dans les locaux de l’ancien Parlement allemand à Bonn en Allemagne que se tient chaque année le Global Media Forum organisé par la Deutsche Welle. Ironie, car 1500 acteurs du monde des médias se réunissent dans un lieu qui n’évoque plus que le souvenir d’un pouvoir qui s’est aujourd’hui déplacé ailleurs. Comme ces médias qui n’osent plus se baptiser de “4ᵉ pouvoir” tellement le souvenir lointain de leur puissance passée semble appartenir à une autre ère.

Deux jours de discussions entre professionnels du monde entier dominés par la « guerre » contre la Russie, le traitement du conflit à Gaza et les menaces de l’IA. On retiendra aussi un focus sur les enjeux du climat et de la biodiversité qui n’est peut-être pas sans lien avec la présence dans le bâtiment voisin des agences des Nations unies en charge de ces questions. Parmi les thèmes transversaux, je retiens celui de la place et du rôle des femmes dans les médias qui a traversé nombre d’interventions.

Si j’ai l’impression d’avoir assisté à un événement plutôt dépressif, c’est que plusieurs menaces ont été systématiquement présentes dans les interventions:

  • le recul du journalisme face à des États comme la Russie, la Chine et pourquoi pas les États-Unis à nouveau. Au passage, il n’a pas été question de la France, la perspective d’accession au pouvoir d’un gouvernement illibéral ne semble pas encore prise au sérieux;
  • la menace des géants de la tech (réseaux sociaux et entreprises du secteur de l’intelligence artificielle, quand ce ne sont pas les mêmes); 
  • la défiance des citoyens (particulièrement illustrée par la présentation du dernier rapport Digital News Report du Reuters Institute for Journalism)
  • les insuffisances des modèles économiques, etc.

La guerre de l’information fait partie de la guerre déclenchée par la Russie

Vu de France, la première surprise concerne la tonalité employée vis-à-vis de la Russie et de son programme massif de désinformation. À Bonn, on considère très frontalement que c’est une véritable guerre qui est en cours sur le terrain de l’information et qu’il faut se donner les moyens que la situation réclame. Aucun angélisme, la menace est concrète et les réponses doivent être fortes, entend-on. « La démocratie n’est pas tombée du ciel », a rappelé la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, « Nous devons la défendre ».

La prix Nobel de la paix, Maria Ressa, est même allée plus loin: « Il s’agit d’une année cruciale pour la démocratie », a-t-elle expliqué, considérant 2024 comme un « point de bascule » potentiel pour l’ordre international fondé : « 71 % du monde est aujourd’hui soumis à un régime autoritaire. La démocratie recule, notre fenêtre pour agir se referme, mais elle est toujours là. »

Ensuite, face aux défis que représentent les avancées rapides de l’intelligence artificielle générative, la tonalité était aussi au pessimisme. Là encore, peu de sources d’espoir et beaucoup d’intervention autour des menaces que fait peser l’IA sur l’existence même du journalisme. J’espère qu’on entendra quelques perspectives plus positives lors des premières Rencontres de l’IA éditoriale que Samsa organise le 1ᵉʳ juillet à Paris.

Même chose sur le climat. Là encore, peu de signes d’espoir au cours de cette conférence. La défiance d’un grand nombre de citoyens vis-à-vis de l’information sur le dérèglement climatique a encore été soulignée.

Et pour planter un clou supplémentaire dans le cercueil de l’information (telle que nous la connaissons), Nic Newman, du Reuters Institute for Journalism, est venu partager l’un des résultats de leur tout dernier rapport: près de 40% des jeunes de 18 à 24 ans reconnaissent éviter l’information (“news avoidance”).

Retrouvailles avec quelques bénéficiaires des programmes Samsa Africa

Un forum organisé sur fond de réduction budgétaire pour les médias publics allemands à la suite des décisions de la Cour constitutionnelle à l’automne dernier, qui a demandé au gouvernement de trouver 60 milliards d’euros d’économies dans les budgets publics. La Deutsche Welle n’est pas épargnée par les restrictions.

Pour ne pas sombrer dans la dépression, j’ai eu le plaisir de retrouver parmi les 1500 participants au moins une dizaine de journalistes venus d’Afrique qui ont suivi des formations délivrées par Samsa Africa sur le continent ou qui ont participé à des programmes développés par Samsa Africa pour des agences de développement média européennes. L’occasion de prendre des nouvelles et de constater que la famille Samsa est toujours dynamique sur le continent. Même dans des conditions difficiles.

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